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Un conte afghan : le prince et son poulain noir
Un conte afghan :
le prince et son poulain noir
Un roi n'avait qu'un fils.
Longtemps attendu, il était tendrement aimé du roi et de la reine.
Autant que le roi aimait la reine et que la reine aimait le roi.
C'était une famille heureuse.
Mais quand le jeune prince eut sept ans, la reine est morte.
Grand chagrin du roi, grand chagrin du jeune prince.
Un an s'est passé.
Le roi s'est remarié.
La nouvelle reine n'aimait pas le jeune prince,
fruit des amours du roi avec celle qu'il avait tant aimé.
Elle se demandait comment elle pourrait se débarrasser de lui.
Un jour elle a eu une idée.
Le roi aimait beaucoup les chevaux
mais dans son pays tous les chevaux étaient blancs.
Et pourtant, un jour,
est né un poulain noir.
Le roi en a fait cadeau à son fils.
Le jeune prince et le poulain sont devenus deux amis inséparables.
Tous les jours le prince amenait au cheval des friandises.
Tous les jours le cheval lui faisait faire de longues promenades,
dans la campagne, le long des ruisseaux, le long des torrents.
Et ils parlaient ensemble.
Cette amitié si profonde entre le cheval et le garçon
attisait la jalousie de la reine.
Alors ...
elle a fait venir son serviteur, lui a donné de l'argent
pour qu'il le donne à tous les médecins de la ville
à condition qu'ils déclarent tous, quand la reine tomberait malade,
qu'elle ne guérirait que si elle mangeait de la chair du poulain noir.
L'argent a été distribué.
Il ne restait plus qu'à tomber malade.
La reine a pris des herbes et s'en est frotté la peau.
Sa peau est devenue toute jaune.
Elle a mis un sac de pommes de pin sous ses vêtements, de sorte que, quand elle bougeait,
on entendait toutes sortes de craquements.
Et elle a fait venir le roi, disant qu'elle se sentait très malade.
Le roi, la voyant toute jaune, et entendant tous ces bruits qu'elle faisait en bougeant ou en respirant
a fait venir tous les médecins de la ville.
Tous ont longuement examiné la malade,
ont beaucoup réfléchi,
ont beaucoup discuté du diagnostic avec des mots très savants,
et finalement sont tous tombés d'accord :
une seule chose pouvait sauver la reine :
c'était qu'elle mange de la chair du poulain noir.
Et ils ont dit cela au roi.
Le roi savait l'affection de son fils pour le poulain.
Mais si la guérison de sa femme était à ce prix...
Il a donc donné l'ordre que l'on tue le poulain,
et dit à l'instituteur de garder ce jour là son fils à l'école plus longtemps
afin qu'il ne soit pas là au moment où.....
Le roi a décidé que l'on tuerait le poulain le lendemain.
Le lendemain, quand le jeune prince est parti à l'école,
il a été comme chaque matin caresser son cheval.
Et voilà que le cheval a rapproché sa tête de celle de son jeune maître
et lui a dit :
la reine fait semblant d'être malade...
pour qu'on me tue et que tu me perdes.
Ils vont faire cela pendant que tu seras à l'école,
écoute :
quand tu m'entendras hennir une première fois, tu sauras que l'on me sort de l'écurie,
quand tu m'entendras hennir une seconde fois, tu sauras que l'on me lie les pattes,
quand tu m'entendras hennir une troisième fois... viens vite !
car on sera près de me couper la tête.
Le jeune prince a longuement embrassé son cheval tant aimé
et il est parti à l'école.
Ce matin là, à l'école, le prince n'écoutait pas le maître.
Quand il a entendu une première fois hennir son ami,
il a demandé au maître la permission de retourner au palais.
- Non, reste à ta place !
Quand il a entendu le deuxième hennissement, il a demandé à nouveau au maître...
qui lui a donné une grande gifle.
Quand le prince a entendu une troisième fois son cheval hennir,
il a encore demandé au maître la permission de sortir
mais le maître l'a renvoyé à sa place brutalement.
Alors le prince a pris le braséro, l'a jeté sur la tête du maître,
et est parti en courant au palais.
Il est arrivé juste à temps.
Surprise du roi.
Le prince lui a demandé la faveur de faire une dernière promenade avec son cheval.
Le roi a accepté.
Une première fois le cheval a fait le tour de la grande cour, devant le palais.
Une deuxième fois il en a refait le tour, et tout le monde les regardait,
sans un autre bruit que celui des cailloux frappés par les sabots.
Mais au troisième tour ...
voilà que le cheval s'est élevé dans les airs, avec son cavalier,
et ils ont disparu vers l'horizon.
Après un grand voyage le cheval s'est posé
au milieu d'un jardin plein de fleurs, d'arbres rares,
de bassins d'eau aussi pure que du cristal.
Là le cheval a expliqué au prince qu'ils étaient dans la palais d'un riche sultan,
et que maintenant il devait partir et laisser le prince seul.
Mais il lui a donné quatre poils de sa crinière, en lui disant :
Si tu as besoin de me voir, brûle un de ces poils,
et je serai là, près de toi.
Puis le cheval a disparu.
Le prince a caché ses riches vêtements brodés d'or
dont les boutons étaient de pierres précieuses,
et il s'est habillé d'une peau de mouton
puis s'est fait embaucher comme aide-jardinier.
Ainsi il est resté là pour travailler dans le jardin du sultan.
***
Le sultan avait sept filles.
La plus jeune était la plus belle.
Elle aimait rêver, et la nuit il lui arrivait d'aller à la fenêtre de sa chambre,
qui s'ouvrait au-dessus des jardins, pour regarder les étoiles.
Or voici ce qui est arrivé.
Le jeune prince, devenu aide-jardinier,
s'ennuyait tellement de ne plus voir son cheval
qu'une nuit il a fait brûler un des quatre poils
et voilà que le poulain noir était là !
Alors il a remis ses beaux vêtements de prince
et sur son magnifique cheval il s'est promené toute la nuit dans les allées du jardin.
Il pensait que personne ne le voyait, mais la septième fille du sultan était à la fenêtre
et était émerveillée de voir comment cet aide-jardinier s'était transformé.
Une deuxième fois le prince a fait brûler un poil de la crinière
et encore une troisième fois, et chaque fois le cheval revenait.
Chaque fois aussi la septième fille du sultan assistait à la promenade nocturne.
Et voilà que, dans le secret de son coeur, elle est devenue amoureuse de l'aide-jardinier.
Mais comment une princesse pourrait-elle déclarer son amour pour un aide-jardinier ?
Un jour le sultan a décidé de marier ses sept filles. Il a donné à chacune une orange.
Chacune devait donner cette orange à l'homme qu'elle choisirait pour époux.
Et le sultan a fait venir tous les notables du pays.
Sa fille aînée a choisi un riche vizir. La seconde un émir, et ainsi de suite :
toutes elles ont choisi des hommes riches et occupant des fonctions importantes dans le royaume.
Mais quand le tour de la plus jeune est arrivé
elle n'a donné son orange à personne.
Le sultan était mécontent.
Il a fait venir tous les hommes qui ne s'étaient pas présentés
mais sa plus jeune fille n'en choisissait aucun
jusqu'au moment où le dernier a été amené devant elle :
c'était l'aide-jardinier.
Le sultan était furieux !
Elle avait choisi le plus pauvre pour mari.
Il les a chassés de la ville.
Alors le jeune prince a brûlé le quatrième poil de la crinière,
le cheval est arrivé et les a emportés bien loin du palais du sultan.
Il les a conduits dans une large plaine entourée de montagnes
et leur a dit de rassembler là toutes les gazelles de la région.
Ce qu'ils ont fait.
Mais un jour, dans son palais, le sultan est tombé gravement malade.
Ses médecins lui ont dit qu'il ne guérirait que s'il mangeait de la chair de gazelle.
Le sultan a envoyé ses six gendres lui capturer des gazelles
mais ils n'en ont trouvé aucune, toutes les gazelles avaient disparu de la région.
En cherchant ils ont fini par découvrir la grande plaine entourée de montagnes
où le prince et sa femme avaient regroupé toutes les gazelles.
Les six gendres ont voulu acheter des gazelles.
Le prince a accepté de leur vendre à chacun une gazelle
mais à condition qu'ils soient marqués au fer rouge sur le dos avec le fer des esclaves.
Ils ont été obligés d'accepter car le sultan les avait menacé de mort s'ils ne ramenaient pas de gazelles.
Au retour des six gendres, le roi a pu manger de la chair de gazelle.
Mais il ne guérissait pas.
C'est alors que le prince, qui avait gardé les têtes des six gazelles, a fait une soupe avec ces têtes,
et est venu au palais en donner au sultan.
Dès qu'il a accepté d'en prendre, il s'est trouvé guéri.
Le prince lui a dit qu'il recherchait ses six esclaves.
Il a fait déshabiller les six gendres du sultan. Tous avaient la marque des esclaves !
Alors le sultan a mis son turban royal sur la tête du prince
qui est devenu le nouveau sultan de ce riche royaume.
Mais jamais plus on n'a revu le petit poulain noir.
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Commentaires
8NiudraMardi 3 Mars 2020 à 20:19Pour le connaisseur de l'Orient ( Iran, Jordanie, Arabie, Turquie, Syrie ce conte est une pure merveille.
Les dessins et la miniature perse magnifiques.
L'histoire et le miroir de la vie qu'elle met en scène, un régal.
MERCIS au pluriel.
JPA
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Mardi 3 Mars 2020 à 20:58
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Oulla, mais tu as tort de penser que tu ne devrais pas nous mettre en mémoire des jolis contes illustrés comme tu le fais!! non non, lâche pas le PC!!! j'ai hâte d'en lire un autre pour trouver un autre prince!!!hihi pourquoi pas!!hihi on peut rêver à sa jeunesse!!!Prends soin de toi!!Bisous Fan
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Lundi 2 Mars 2020 à 14:11
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6lenez o ventDimanche 1er Mars 2020 à 20:05un conte enchanteur qui m'émerveille ainsi que tes dessins ( lu 3 fois )
des poulains noirs, il doit en exister
Merci pour ce beau partage
Prends soin de toi
Bisous Pinson
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Dimanche 1er Mars 2020 à 20:19
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Réponse à - ISIS - - - - -
Merci Isis. Tu me sauves d'une situation ridicule.
Car j'ai republié ce conte sans même m'en rendre compte, je crois que je perds réellement les pédales !
Il vaudrait mieux que je fasse vraiment roue libre quelque temps (pour le moins).
Ou que je brûle un poil de mon poulain noir, si j'ai le bonheur d'en retrouver un, mais ce n'est pas assuré.
Bonne semaine Isis.
Merci, avec tes contes, je rajeuni!!!je retrouve mes 10 ans!!! une belle histoire qui fait rêver les petites-filles!!! C'est la fête des mamies!!Merci pour ma fête!!hihi Bisous Fan
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étonnant conte - qu'il faut relire plusieurs fois - c'est de vous, ou nous pouvons l'acheter en livre ?